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Îlot de chaleur urbain : ce que tout élu doit absolument savoir

Table des matières

La lutte contre l’îlot de chaleur urbain, le changement climatique, la canicule et les inondations est – et continuera à devenir – un enjeu électoral majeur. Elle passe notamment par la végétalisation urbaine, et les électeurs l’ont compris.

63% des Parisiens considèrent que les mesures prises pour lutter contre la canicule et les fortes pluies sont insuffisantes (sondage commandé par ECOVEGETAL). Dans les villes moyennes, ce sont jusqu’à 80% des habitants qui affirment déjà qu’ils tiendront compte de l’enjeu végétal aux prochaines élections, 60% dans les communes rurales.

Dans son projet de végétalisation de la capitale 2014-2020, la Mairie de Paris prévoyait la création de 30 hectares d’espaces verts, la plantation de 20 000 arbres… et la végétalisation des toitures. Sa révision du PLU 2016 oblige encore tout nouveau bâti sorti de terre à présenter une part de végétalisation.

Mais les projets et réalisations font débat. Y a-t-il du sens à faire grimper des plantes sur les balcons ? Comment entretenir une toiture qui a été végétalisée ? Et avec quel budget ? Ne vaux-t-il pas mieux préférer directement désartificialiser les sols en créant des espaces verts au cœur de la ville ?

Ces questions sont révélatrices d’un blocage très répandu. En réalité, les architectes comme les élus se posent encore le problème dans le mauvais sens. Leurs préoccupations sont encore trop liées aux choix des « bons » végétaux, alors qu’ils devraient porter sur tout autre chose…

« Faut-il des platanes ou des chênes dans le nouvel espace vert ? » « Multiplier les potagers urbains ne permettra pas de nourrir tout un quartier ». « Les toits de ce quartier sont difficiles d’accès, donc impossible d’y planter des arbres ». Si vous en êtes déjà venu à une conclusion similaire sur un projet de végétalisation, c’est qu’il y a un problème.

En réalité, lorsqu’il s’agit de verdir sa ville, un élu devrait se poser la question sous un autre angle : quel système de végétalisation peut apporter les meilleures performances à tel ou tel endroit ?

Pour trouver les bons outils, encore faut-il les connaître et les comprendre. Voici donc un rappel des points essentiels à connaître, pour un élu, en ce qui concerne la végétalisation et la lutte contre l’îlot de chaleur urbain.

Ville îlot de chaleur comment lutter

1 – Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur urbain ?

C’est un phénomène auquel la population a été très sensibilisée par les récents épisodes de canicules. Ces dernières années, quasiment tout l’hexagone a souffert d’une forte augmentation des températures, notamment en milieu urbain.

Ces fameux îlots dont on parle correspondent à une élévation des températures des centres-villes par rapport à la périphérie et aux milieux ruraux.

La hausse des températures se ressent non seulement en journée mais surtout la nuit, où les matériaux des infrastructures urbaines rejettent toute la chaleur emmagasinée.

Cet effet de serre impacte fortement le confort de vie en ville.

2 – Qu’est-ce qui provoque un îlot de chaleur urbain ?

  • a – Le changement climatique
  • b – L’artificialisation des sols
  • c – Les matériaux des infrastructures urbaines
  • d – Les gaz d’échappement

Si vous avez répondu la première option, vous allez dans le mur.

En réalité, aucune de ces réponses, prise seule, n’est suffisante pour expliquer le phénomène. L’îlot de chaleur urbain à Paris ou Lyon, Marseille ou Lille, relève d’une combinaison de tous ces éléments à la fois.

Vous ne pouvez pas échapper à la thématique réchauffement climatique, c’est évident. Vous avez suivi les conclusions des Accords de Paris, vous avez certainement, en tant qu’élu, un discours engagé… Mais au niveau de votre ville, le réchauffement n’est pas du tout le premier responsable de la canicule. Il l’aggrave, mais il n’en est pas à l’origine.

3 – Quel est le rapport entre les sols artificiels et la température dans ma ville ?

En ville (petite, grande ou moyenne, peu importe), vous avez des sols de parkings, des routes, des rues d’asphalte, allées et trottoirs goudronnés. On peut y ajouter les bâtis qui combinent ciment, briques, béton et autres matériaux enrobés. C’est ce qu’on appelle des surfaces artificialisées.

Ces surfaces sont non seulement minérales mais encore imperméables. Les matériaux ne respirent pas. L’été, ils absorbent et stockent la chaleur en plein jour, pour la restituer en pleine nuit. La température ne diminue pas, cela provoque l’effet caniculaire tant redouté, avec des pics records qui dépassent les 40°C.  

L’hiver ou en période de fortes pluies, l’imperméabilisation des sols renvoie les eaux pluviales vers les réseaux d’égouts qui saturent aujourd’hui très vite.

4 – Quelles autres surfaces posent problème avec la chaleur ?

Vous vous en doutez, il n’y a pas que le béton qui pose problème.

D’autres matériaux sont décriés aujourd’hui par les spécialistes pour leur effet aggravant. Comme le verre et le métal, qui absorbent énormément la chaleur et la dispersent en continu. Pour exemple, vous pouvez constater ici les différences de température dans Paris en pleine canicule selon les surfaces.

Les nouvelles constructions futuristes, avec leurs baies vitrées et leurs airs de tour de cristal sont en fait des bombes à retardement pour une municipalité.  

Voilà encore un exemple qui aurait dû faire date : celui de l’hôtel Vdara, à Las Vegas. Tout l’immeuble a été conçu comme une immense baie vitrée… Orientée face au soleil. Résultat, les clients descendus profiter de la piscine souffraient de brûlures sévères et leurs cheveux prenaient feu… La réponse de l’hôtel ? Installer des parasols. 

Pour la responsabilité, on repassera.

5 – La morphologie urbaine joue-t-elle tant que ça sur la température ?

Oui. Selon les zones d’ombre que réserve l’aménagement, la circulation de l’air, les entrées de vent, la chaleur s’emmagasine ici plutôt que là.

Contrairement à l’idée haussmannienne selon laquelle élargir les rues permettrait de mieux faire circuler l’air, les études affirment aujourd’hui que les rues sinueuses, les ruelles étroites et les cœurs de ville qui ne suivent pas une organisation géométrique maîtrisent mieux les vagues de chaleur. L’air s’y rafraîchit naturellement plus vite.  

Autrement dit, le rectiligne est passé de mode.

6 Et la chaleur anthropique ?

Il faut ajouter au choix des matériaux et de la disposition urbaine l’impact des activités humaines.

Entendez par là les transports (pourcentage d’électrique, présence d’autoroutes ou de grandes voies), les systèmes de chauffage et de climatisation, qui ont un effet contre-productif.

7 – L’effet de la végétation sur un îlot de chaleur est-il prouvé ?

Oui, avec un abaissement net des températures notable, même pendant le pic de chaleur. Dans une rue plantée d’arbres, on peut noter une différence allant jusqu’à 3°C entre la zone exposée au soleil et l’ombrage naturel (résultat constaté par cette étude américaine, entre autres).

8 – À quoi doit-on ce rafraîchissement ?

La végétation n’est pas seulement là pour faire de l’ombre. C’est une caractéristique protectrice des zones plantées d’arbres, mais ce n’est pas la seule fonction des végétaux en ville.

Les plantes, la terre et le substrat absorbent la chaleur mais ne la stockent pas, à l’inverse des minéraux. Cela contribue à rafraîchir l’air par rapport à une infrastructure urbaine classique.

Mais il y a mieux : les végétaux transpirent. C’est ce phénomène d’évapotranspiration qui limite la chaleur en humidifiant l’air.

9 – Il faut donc beaucoup d’espaces verts pour rafraîchir la ville…  

Oui et non. Ne vous trompez pas de raisonnement…

En effet, éliminer un espace urbain pour le rendre exclusivement vert n’a de sens ni pour les citoyens qui en avaient l’usage, ni pour les résultats tant attendus dans votre lutte contre l’îlot de chaleur.

Il serait contre-productif d’aménager de petits parcs ou une couronne de platanes autour d’une place avec sa statue de bronze brûlante au soleil. Et planter des centaines d’arbres dans un coin n’empêchera pas le quartier des buildings d’à côté de devenir une fournaise par fortes chaleurs.

Pour qu’un verdissement porte ses fruits, vous devez plutôt raisonner à la parcelle. Et cela vaut aussi bien pour les périodes de canicule que les épisodes de fortes pluies.

Il vaut mieux végétaliser par-dessus l’existant, en visant des performances locales et précises, plutôt que d’étaler de petites touches vertes en imaginant obtenir une performance globale.

10 – Comment une toiture végétale peut-elle être plus performante qu’un jardin ?

Dans un souci de cohérence urbaine, vous avez tout intérêt à privilégier les projets de type toiture verte, plutôt que d’essayer de dégager des surfaces nettes à verdir en plein centre-ville.

Le projet s’avère forcément moins coûteux en termes d’aménagement, moins long à mettre en place, bien plus simple à exécuter et intéressant sur le plan des performances écologiques.

Une toiture végétale réussie, c’est :

  • Des performances thermiques améliorées pour l’édifice (fraîcheur en été, chaleur en hiver) ;
  • Pas de stockage massif de chaleur en période de canicule (à l’inverse d’une toiture en zinc, en tuiles ou autres toits typiques de certaines grandes agglomérations) ;
  • Moins de réverbération grâce à la présence de végétaux (les rayons qui se réverbèrent font augmenter la température) ;
  • Une évapotranspiration systématique qui adoucit les températures ;
  • Un contrôle des fortes pluies par absorption naturelle des végétaux et de leurs substrats ;
  • La préservation voire le retour de tout un écosystème (insectes pollinisateurs, oiseaux diurnes et nocturnes, etc.) ;
  • Un résultat esthétique toute l’année.

11 – Quelles sont les autres solutions de végétalisation contre l’îlot de chaleur urbain ?

Partant du même raisonnement à la parcelle, vous avez d’autres leviers pour réduire l’effet caniculaire dans votre ville.

Par exemple, la végétalisation des façades (à même les murs et au pied des bâtis), qui permet d’abaisser la température des bâtiments en été… tout en jouant un rôle d’isolant thermique en hiver.

Autre solution majeure dans l’équilibre thermique urbain : les sols perméables.

Il est loin le temps où on arrosait les rues pour leur rendre un peu de fraîcheur. Pour rendre le cœur des villes respirable à nouveau, il faut que les sols respirent. C’est possible sur des surfaces comme les parkings et les allées piétonnes, qui représentent déjà une surface conséquente.

Cela ne veut pas dire engazonner tout le centre-ville, mais ouvrir les sols pour les rendre filtrants. Ils filtrent les rayons du soleil et les pluies. Cela en fait d’excellents remèdes aux phénomènes d’inondations qui se généralisent.

12 Mais alors, avec quoi faut-il végétaliser ?

Attention à vous poser les bonnes questions au bon moment…

Il arrive encore trop souvent que les projets de végétalisation commencent par un tour de table sur « quelles plantes poser sur tel rond-point » ou « pins ou chênes le long de cette artère ».

Vous devez avant tout vous demander quel système de végétalisation pourra vous apporter les meilleures performances sur toute une surface verte. Avant l’enjeu esthétique. Donc ne plus raisonner en pensant « massifs de fleurs » mais « végétation extensive ou intensive ».

La végétation extensive est l’une des solutions les plus simples à mettre en place. Elle demande moins d’entretien (donc idéale pour des toitures d’accès limité) et résiste à des climats secs ou très froids.

Vous avez encore la végétation intensive, semi-extensive, l’option potager, voire une pose de gazon.

Vous retrouvez ces options sur les sols de type parking, avec une végétation extensive simple, un gazon ou du minéral en structure alvéolaire.

13 – Une constante à retenir : le retour de l’eau

On l’a déjà dit, oubliez les tuyaux d’arrosage déployés pour rafraîchir le bitume brûlant en milieu de journée…

En revanche, la présence de l’eau dans votre ville est essentielle pour réduire la chaleur. Infiltration dans les sols, évapotranspiration : la végétalisation, vous l’avez déjà compris, participe à un rétablissement du cycle de l’eau.

Pour trouver les solutions adaptées à votre municipalité, passez ici le quizz spécial élus sur le phénomène d’îlot de chaleur.

Et pensez à vous abonner à la revue Truelle et Coquelicot.

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Pierre GEORGEL

Passionné de botanique depuis son enfance, a transformé son amour pour les plantes en une carrière florissante. Après des études réussies en horticulture et en paysagisme, il a lancé un projet audacieux à 20 ans : un jardin sur le toit du garage familial. Malgré des débuts difficiles, il co-fonde ECOVEGETAL, qui devient en 15 ans la référence en France pour les jardins sur toits et parkings. Une belle histoire d'innovation et de passion transformées en succès entrepreneurial.